L’activité physique quotidienne comporte un lot de péripéties improbables. Je crois fermement qu’une personne devrait bouger tous les jours. Le plaisir dans l’activité devrait être une priorité pour le mouvement, mais viser la compétence ou le dépassement quelques fois par semaine est vraiment quelque chose que j’aime.
Au fil des années, il m’est arrivé plusieurs situations grotesques liées à l’entraînement. Comme je sais à quel point les gens aiment rire de moi, j’ai décidé de partager quelques anecdotes sur ma deuxième vie. 1. La vilaine chute Je fais du vélo, je vais très vite et j’approche d’un trottoir sur lequel je veux monter. Ma dernière pensée consciente est « Est-ce que je suis capable de monter sur le trottoir? ». Réponse du cosmos: « Oui et non ». Je me réveille à l’hôpital endolori avec un sentiment d’inquiétude. Un infirmier sort de la brume devant mes yeux et me demande mon nom. Je lis mon nom sur le bracelet à mon poignet, il hoche de la tête. On m’explique que j’ai fait une commotion cérébrale, que quelqu’un m’a trouvé par terre. Je lui demande : « est-ce que j’ai fait mal à quelqu’un? » Sa réponse : « christ ça fait 3 fois que tu me le demandes! » Après quelques tests, je ressors de l’hôpital confus. J’ai retrouvé mon casque de vélo couvert de marques et j’ai consulté un rapport de police sur lequel on peut lire « Il a fait une vilaine chute à vélo ». Depuis ce jour, je n’ai jamais vraiment refait de ce vélo. Note : Ma conjointe dit que je n’éternuais jamais avant cet incident… Visiblement se cogner fort sur la tête peut avoir toutes sortes de conséquences. 2. On se demandait... Un homme qui circule fréquemment dans mon quartier me voit souvent faire de la corde à sauter (une de mes activités préférées). Un jour il s’arrête avec son petit chien blanc, l’air préoccupé. « L’autre jour, on se demandait si tu es un boxeur? » Moi je me demande qui est « on » et s’il y a des réunions de quartier à mon sujet. J’ai plusieurs questions à ce sujet : qui est présent lors des réunions, où se trouve le point à mon sujet est dans l’ordre du jour (probablement sous le point varia). Bref, je ne dis rien, mais j’ai plus de questions que de réponses. Devant mon air perplexe, l’homme tente maladroitement de m’apporter du réconfort. L’homme ajouta plus tard une phrase mystique lorsque je suis à bout de souffle. « Tu sais, tu vas être correct. » J’imagine qu’il veut me rassurer, il semble croire que je veux faire face à une apocalypse de zombies. 3. La voisine inquiète Suite à l'achat d'une maison je fais mon apparition dans un nouveau quartier. Ma voisine d’en face est une sympathique étudiante en éducation et une mère de famille. Comme je m’entraîne principalement à l’extérieur, elle est témoin de plusieurs activités, principalement le cardio. Pendant cette période, mon entraînement consistait à courir avec une veste lestée de poids. J’ai généralement la combinaison suivante : lunette fumée, cheveux rasés très court, veste lestée et je cours comme si le diable me pourchasse. Quand je circule quotidiennement, elle me regarde avec gentillesse, mais je devine un mélange de sympathie et de pitié (le regard que l’on pose parfois sur les personnes avec des problèmes de santé mentale). Plus tard je vais apprendre à la connaître et elle va me faire la révélation suivante : « J’ai cru que tu portais une veste pare-balle et que tu étais une espèce de militaire. » Pauvre elle, moi je me demande si elle était présente à la réunion de quartier à mon sujet, et ce de quelle manière le groupe est passé de la discussion sur la possibilité que je sois un boxeur jusqu’à celle où je suis possiblement un paramilitaire compulsif obsédé par l’apocalypse qui s’entraîne avec un gilet pare-balle. 4. Sherbrooke, je t’aime La population de Sherbrooke est une population très courtoise et aimable. Pendant longtemps, Sherbrooke figurait dans les villes où il est fort probable que quelqu’un rapporte un portefeuille retrouvé. La ville de Sherbrooke est également connue pour ses pentes prononcées. Pendant mon entraînement, je porte un sac de sable sur mon dos. Le sac est plutôt lourd et je tente de sprinter dans une pente à pleine vitesse. Dans ma tête, je suis Usain Bolt sur la cocaïne qui fait des grandes foulées. En réalité, je dois ressembler à Kung Fu Panda qui tente d’escalader les marches vers le temple. Dans ma séance, pas moins de deux voitures ralentissent à ma hauteur. Le conducteur baisse sa fenêtre « As-tu besoin d’aide? Je peux te donner un lift. Ça a l’air lourd.» Ce phénomène se produit de temps à autre dans Sherbrooke, une ville où la plupart des gens sont très courtois. Plus tard la question me passera par la tête : est-ce que les automobilistes sont d’autres résidents du quartier qui veulent me dire que « Ça va être correct dans le fond, tu peux te calmer »? 5. La fois du ballon Je m’entraîne à tenir la position de handstand (à l’envers en se tenant sur les mains, mes pieds contre le mur). Souvent, pour me concentrer dans l’effort d’équilibre, je ferme mes yeux. Je suis dans une cour d’école le soir, pas très loin d’un terrain de soccer sur lequel s’amuse une bande d’enfants. Tout à coup un enfant botte très fort un ballon dans ma direction générale. Un enfant me crie quelque chose, j’ouvre les yeux pour constater que la forme circulaire du ballon se dirige à grande vitesse vers moi. Pas le temps de me remettre sur mes pieds, je regarde impuissant, le ballon me claquer au milieu du visage sous les regards perplexes des enfants. Note : Au dernier instant j’ai essayé de souffler de toutes mes forces pour repousser le ballon. 6. La fois des « Oh shit » Je suis en automobile avec mon bébé, pour une raison x il y a une urgence avec un gobelet ou un biberon. J’active les feux d’urgence, je me gare sur le côté, mais l’auto est momentanément un obstacle pour la voiture derrière nous. Alors que je suis étiré pour ramasser les choses du bébé, la voiture derrière klaxonne très agressivement. La situation dégénère au point où un jeune homme sort de la voiture et marche activement vers la mienne. Je réagis instinctivement, je sors de ma voiture et je fais quelques pas. Le jeune homme et un passager me regardent éberlués en répétant comme une litanie Oh shit, oh shit, ooooh shit. Le jeune homme est retourné comme par magie dans la voiture et j’ai regardé le véhicule démarrer en trombe pour me laisser dans le stationnement. Par chance que je ne portais pas ma veste pare-balle. Je me dis que l'apocalypse ne sera pas faite de zombies, mais de cowboys à casquette en Civic. 7. Ça a l’air facile. Quand tu fais de la callisthénie, il y a toujours quelqu’un qui croit que ce que tu fais est facile. Un jour, je pratique des handstand pushups (des pushups en se tenant sur les mains avec les pieds dans les airs). Une bande de jeunes hommes se tient plus loin. Comme j’ai les pieds contre un mur, je descends tranquillement mes répétitions vers le sol qui est asphalté. J’entends un jeune homme affirmer aux autres que ce que je fais est « facile ». Je ne lui prête pas attention. Il se dirige vers le mur, pose ses mains au sol et se retrouve finalement les pieds dans les airs en position. ET… La descente est extrême, sans même faire une répétition le gars s’écrase le visage sur l’asphalte pour finalement se retrouver cul par-dessus tête. J’aime penser que je suis plutôt une bonne personne. Je dois cependant affirmer que regarder un gars s’écraser sur le visage en essayant de faire un handstand pushup est un plaisir unique. 8. Le vendeur de drogue Un jour, j’ai mal fixé une barre dans un cadre de porte pour faire des tractions. Au milieu de l’effort, la barre décroche violemment et je me fends le dessus de la tête. Je me souviens être assis par terre et de regarder la barre de métal rebondir dans le corridor. Du liquide chaud me coule sur le crâne. Je sors dehors me mettre la tête dans la neige (ce qui en dit long sur mes talents en premier soins). Après plusieurs tentatives de me soigner seul, je comprends que je ne suis pas Rambo. Plus tard je me retrouve à l’urgence où je vais passer la nuit. Je passe finalement vers 5h00 du matin lorsqu’une infirmière me réveille et que je dois me décoller mon capuchon du crâne pour aller parler au docteur. Ce dernier se tient loin, visiblement méfiant, et me demande de me dévêtir. Il faut savoir qu’à ce moment, je suis en grande forme, que le docteur découvre mes tatouages et que j’ai la bonne humeur d’un gars qui va manquer une journée de travail parce qu’il est trop idiot pour solidifier une barre de métal. Le docteur refuse de me soigner sans un interrogatoire. « Tu as rencontré ton homme pas vrai? » est la question qu’il me pose très souvent. Le docteur croit que je suis un trafiquant de drogue et il faudra de longues minutes pour démonter ses impressions et me rendre au soin. 9. Le lièvre et la tortue Une fois dans le parc du quartier je m’entraîne activement à ramper. C’est beaucoup plus difficile que ce que l'on peut croire. Il est très tôt le matin, je m’entraîne donc le long de la piste qui traverse le parc parce que je suis seul. Finalement, un aîné se retrouve à parcourir le chemin et nous nous retrouvons côte à côte. Il marche avec une certaine lenteur ce qui lui demande de grands efforts. Comme je suis en fin d’entraînement, je suis également au bout de mes efforts. Je ne sais pas comment expliquer l’hilarité de me retrouver pratiquement avec « mes coudes contre les pieds de l’aîné » dans ce qui ressemble à une course de tortues dans le parc. Moi et l’aîné nous allons à la même vitesse pour traverser la moitié du parc jusqu’à ce que je m’étale au sol. J’ai vraiment espoir que l’aîné ne se retrouve pas dans la réunion de quartier à mon sujet.
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AuteurJ'essaie d'inspirer chaque personne que je rencontre. À défaut, je la faire rire ou je l'ignore. Je suis professeur de sociologie au Cégep de Granby depuis quelques années. J'habite également mon corps et ne vois aucune contradiction à combiner la force de l'esprit et celle du corps. Dans le passé, j'ai occupé la fonction de représentant des organismes communautaires de l'Estrie. Mon objectif est de favoriser une prise de conscience par l'entremise de ma discipline et de mes expériences. Archives
Octobre 2024
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