Cette année je suis privilégié, je commence avec trois cours d’étudiantes et d’étudiants brillants et ouvertes. Je tente de plus en plus des moments de coopération en classe et jusqu’ici les résultats semblent prometteurs. J’écris ces lignes et pourtant je sais qu’il me manque quelque chose, que si je ne tente par quelque chose de radical je vais terminer avec une grande déception… « Humble pie » J’ai toujours aimé cette expression. Cette année, c’est mon tour de manger quelques pointes. L’humilité est une qualité qui manque souvent à mon personnage d’enseignant. Crédit photo : AA C’est difficile, mais il arrive que l’on doive changer notre personnage. Je crois être toujours resté bienveillant, c’est vrai, mais j’ai toujours gardé la peur que ma gentillesse passe pour de la faiblesse. J’ai souvenir de mon état d’esprit enfant, quand l’intimidation a commencé pour moi, et je veux éviter de retomber dans cette dynamique. Pour plusieurs raisons j’entretiens la croyance que le fait de me montrer humble devant un groupe me fera prêter le flanc. Cette attitude est probablement le produit de mes anciennes interactions, mais je reste le seul responsable.
Les dernières années sont trop difficiles pour que je garde le mode « Darth Vader-Terminator-Johnny Lawrence ». Mécanismes de défense ou pas, il y a un prix à payer pour se présenter comme grandiose à la limite de l’arrogance. Je constate que depuis un certain temps la carte « grandeur » de mon personnage me coupe de plusieurs étudiants et étudiantes. En plus, le temps des fêtes a été pénible. Janvier a été une longue descente pour mon personnage : plein de vieilles blessures, des inquiétudes, une incapacité physique à bouger comme je veux, des faiblesses de caractère et une fatigue générale intense. Comment tirer profit de cette situation? J’en profite pour tenter un exercice d’humilité. Je reste compétitif et j’aime faire rire, mais je vais ouvertement assumer mes limites et exposer une grande vulnérabilité. Je fais donc le choix de célébrer une longue liste de malaises et de limites : Comme la fois où j’ai mélangé Roxton Pond et le chemin Roxham. Comme celle où un étudiant m’a repris sur la vitesse possible d’un moineau au badminton (il avait parfaitement raison sur les pointes de vitesse fulgurantes de ce sport). Comme toutes les fois où je suis trop fatigué, faible, blessé ou juste paresseux pour faire ce que j’ai à faire. Toutes les fois où je suis trop catégorique avant de réfléchir plus longuement à une question pour la nuancer. Comme mes nombreuses fautes et mes tares de caractères qui sont visibles depuis l’espace. Comme tous les cœurs brisés, même le mien, parce que je comprends avec beaucoup trop de lenteur les gens qui m’entourent. Pour toutes les blessures que je suis trop petit pour réparer. Comme quand je fais une énorme faute au tableau. Comme un alcoolique qui retombe au fond de sa bouteille et qui constate sa rechute. Comme une paraphrase de Dan Bigras « Quand je serre les fesses plus fort que les poings ». Je n’avais pas le choix, tôt ou tard il fallait que je tente une session dans ce mode. C’est un exercice éprouvant pour moi parce que c’est montrer une grande vulnérabilité. Dans l’espoir de terminer ce cycle et de trouver une manière de coexister avec le sauvage que j’étais, j’entame maintenant une grande marche silencieuse.
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AuteurJ'essaie d'inspirer chaque personne que je rencontre. À défaut, je la faire rire ou je l'ignore. Je suis professeur de sociologie au Cégep de Granby depuis quelques années. J'habite également mon corps et ne vois aucune contradiction à combiner la force de l'esprit et celle du corps. Dans le passé, j'ai occupé la fonction de représentant des organismes communautaires de l'Estrie. Mon objectif est de favoriser une prise de conscience par l'entremise de ma discipline et de mes expériences. Archives
Octobre 2024
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